Contre le règne des experts, technocrates et spécialistes

La mainmise d’une caste dirigeante nous a mené aux désastres

dimanche 4 juillet 2021, par Auteurs divers.

♻️ CONTRE LES EXPERTS ET LEUR MONDE ♻️

« […] le spécialiste, cet homme diminué, modelé par la civilisation pour ne servir la ruche que d’une seule façon, avec une dévotion aveugle de fourmi. » — Lewis Mumford, La Cité à travers l’histoire (1964)

« Le fétichisme de la connaissance quantitative nous a rendus si sots et si bornés qu’on passera pour un dilettante si l’on affirme qu’il suffisait d’un peu de sens esthétique – mais pas celui qui s’acquiert dans les écoles d’art – pour juger sur pièces. » — Jaime Semprun et René Riesel, Catastrophisme, administration du désastre et soumission durable

Contre le règne des experts, technocrates et spécialistes
Contre les experts et leur monde technocratique machinique

L’homme moderne, à la fois contraint et persuadé (souvent, avec succès) de renoncer à déterminer lui-même le développement de la société dont il participe, confie donc entièrement son sort individuel, comme celui de la collectivité, à cette caste de détenteurs du savoir scientifique que constituent les experts, les techniciens, les ingénieurs et autres spécialistes formés (ou déformés) par des institutions d’élite de la civilisation industrielle capitaliste. Devant la logorrhée machinale, froide et inhumaine mais ferme, péremptoire et énergique, dégageant un sentiment d’autorité, d’un expert comme Jean-Marc Jancovici, sorti de Polytechnique et de l’École Normale Supérieure (ENS) Télécom de Paris, le quidam se sent bien faible, bien ignorant, et imagine alors que l’expert en question mérite effectivement son titre, sa position, sa renommée, son autorité. Ainsi est-il amené à adhérer à ses thèses.

Seulement, si les experts savent parfaitement régurgiter des statistiques, des chiffres, des nombres, des théorèmes et toutes sortes de données produites par les institutions scientifiques de la société industrielle capitaliste, ils sont, en revanche, bien souvent incapables de considérer l’état des choses sous un autre angle ou selon des prémisses différentes de celles qui forment le socle de toutes leurs connaissances, de celles qui déterminent lesdites institutions scientifiques, la société industrielle capitaliste dans son ensemble. Par définition, les experts ou spécialistes sont experts ou spécialistes dans un domaine spécifique du savoir scientifico-technique de la civilisation industrielle capitaliste, et ont ainsi tendance à verser dans le scientisme.

Par exemple, les paysans « irrationnels » d’avant la modernisation agricole, tout superstitieux qu’ils étaient, ne détruisaient pas la planète avec autant d’efficacité que les experts rationnels des agences nationales. Les polycultures étaient monnaie courante avant que les politiques scientifiques et rationnelles du gouvernement n’imposent un vaste remembrement en faveur de la mécanisation des exploitations — expression qui en dit long sur la relation qu’entretient la civilisation industrielle capitaliste avec la terre. Maintenant que l’on sait le désastre que cela constitue pour les sols, que la Science a pu le constater méthodiquement, de nouveaux experts conseillent parfois — mais c’est encore assez rare — aux agriculteurs de retourner à la polyculture. Quel progrès.

Comment ne pas voir que le désastre social et écologique en cours est très exactement la conséquence de cette démission collective, le résultat de la mainmise d’une caste dirigeante, en partie composée d’experts (scientifiques, économiques), sur la destinée humaine et même planétaire. [...]

« La nouvelle aristocratie était constituée, pour la plus grande part, de bureaucrates, de savants, de techniciens, d’organisateurs de syndicats, d’experts en publicité, de sociologues, de professeurs, de journalistes et de politiciens professionnels. Ces gens, qui sortaient de la classe moyenne salariée et des rangs supérieurs de la classe ouvrière, avaient été formés et réunis par le monde stérile du monopole industriel et du gouvernement centralisé. Comparés aux groupes d’opposition des âges passés, ils étaient moins avares, moins tentés par le luxe ; plus avides de puissance pure et, surtout, plus conscients de ce qu’ils faisaient, et plus résolus à écraser l’opposition. » — George Orwell, 1984 (1949)

(post de Deep Green Resistance Rennes)

Contre le règne des experts, technocrates et spécialistes
Les spécialistes du monde de l’économie et de la politique anti-démocratique nous pourrissent la vie

- voir aussi : Tribune — Nucléaire : « Jancovici… une imposture écologique ? » - Pour les auteurs de cette tribune, parmi lesquels Attac et le réseau Sortir du nucléaire, l’industrie d’État qu’est le nucléaire tente d’imposer ses « avantages » pour préserver le climat, au prix d’informations souvent tronquées, approximatives ou mensongères. Au centre de ce travail de réhabilitation, les auteurs désignent Jean-Marc Jancovici et ses réseaux.
(...)
Qui est Jean-Marc Jancovici ? Diplômé de l’École Polytechnique et de l’École Nationale Supérieure des Télécommunications de Paris, il enseigne à Mines Paris Tech. Il est membre du Haut Conseil pour le climat. Il conseille à ce titre les dirigeants politiques. Au cœur de l’élite, il est un premier de cordée ! Ce parcours qui lui permet d’asseoir sa place dans les cercles du pouvoir, lui permet aussi de se faire respecter des médias (même quand il les malmène), dans un monde où la place des experts techniques, des « savants » l’emporte sur le reste.
(...)
Sa vision de la société est élitiste. Il appelle de ses vœux un gouvernement d’experts. Le ou la citoyen·ne serait, après un apprentissage… avec un enseignant du Shift, en capacité de comprendre “l’expert” à défaut de participer lui-même, ou elle-même, aux décisions.

P.-S.

Il ne s’agit bien sûr pas de rejeter la méthode scientifique ou la raison, mais d’une part de contester le règne des experts qui étouffe les possibilités de démocraties directes et populaires, et d’autre part de récuser le monde techno-scientifique qui est au service de la Machine, de la civilisation industrielle, au service du capitalisme et du productivisme, au service de l’Etat et de ses outils de surveillance et de contrôle.


Répondre à cet article

modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
[Se connecter]
Ajoutez votre commentaire ici

Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

Partagez la page

Site réalisé avec SPIP | | Plan du site | Drôme infos locales | Articles | Thèmes | Présentation | Contact | Rechercher | Mentions légales | Suivre la vie du site RSS 2.0
Médial local d'information et d'expression libre pour la Drôme et ses vallées, journal local de contre-pouvoir à but non-lucratif, média participatif indépendant :
Valence, Romans-sur-Isère, Montélimar, Crest, Saillans, Die, Dieulefit, Vercheny, Grane, Eurre, Loriol, Livron, Aouste sur Sye, Mirabel et Blacons, Piegros la Clastre, Beaufort sur Gervanne, Allex, Divajeu, Saou, Suze, Upie, Pontaix, Barsac, St Benois en Diois, Aurel...
Vous avez le droit de reproduire les contenus de ce site à condition de citer la source et qu'il s'agisse d'utilisations non-commerciales
Copyleft