2005 : mort de Zyed et Bouna - 2023 : Nahel assassiné par des flics - Rien n’a changé et la situation a empiré

Le racisme et la haine des quartiers populaires servent de carburant électoral

mercredi 29 octobre 2025, par Chronique du régime policier.

Un racisme structurel installé, une fascisation qui se renforce, l’extrême droite déjà en partie au pouvoir, un système policier toujours plus armé, brutal et impuni, de nombreuses personnes tuées par les flics lors de contrôles ou de « refus d’obtempérer », de nombreuses lois racistes et sécuritaires..., en 2025 régime policier et système autoritaire sont bien installés.

Il est grand temps de se donner les moyens d’une grosse offensive et de déplacer la fenêtre d’Overton à gauche, et ça ne passera pas par les élections ou les partis.

2005 : mort de Zyed et Bouna - 2023 : Nahel assassiné par des flics - Rien n’a changé et la situation a empiré

Il y a 20 ans : la mort de Zyed et Bouna, vague de révolte dans les banlieues


C’était il y a 20 ans jour pour jour, en banlieue parisienne. Le 27 octobre 2005 à Clichy-sous- Bois, Zyed Benna, 15 ans, et Bouna Traoré, 17 ans, ainsi qu’un de leurs amis, rentrent chez eux après un match de football. Sur la route, une patrouille de policiers les prend en chasse. Effrayés par la perspective d’un contrôle, de brimades voire de violences, les trois adolescents se cachent sur un site EDF.

Les policiers voient la scène, l’un d’entre eux dit à ses collègues : « Je donne pas cher de leur peau ». Les deux adolescents seront retrouvés morts dans un transformateur électrique. Morts pour avoir voulu se cacher de la police, qui les poursuivait sans raison. Le troisième jeune, survivant, est gravement brûlé. L’acte banal de harcèlement policier du quotidien qui se terminera en drame absolu.

La mort horrible de Zyed et Bouna est suivie, deux jours plus tard, par le tir de grenades lacrymogènes par les CRS, à proximité immédiate d’une mosquée selon les autorités, à l’intérieur du lieu de culte selon les témoins. Les gaz forcent les fidèles musulmans à quitter la mosquée pendant la prière, en plein Ramadan. Cette agression, couplée à la surenchère provocatrice de la police et de son ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy, qui avait parlé de « racailles » et de « nettoyer les cités au karcher » les mois précédents, et à la situation sociale explosive, déclenchent une vague de révolte sans commune mesure dans l’histoire récente.

Des émeutes généralisées sur tout le territoire embrasent les quartiers populaires. Des milliers de voitures et des dizaines de bâtiments partent littéralement en fumée. De sérieux affrontements ont lieu avec les forces de l’ordre pendant plus de trois semaines. Des hélicoptères survolent les tours chaque nuit avec de puissants projecteurs.

La situation devient incontrôlable pour les pouvoirs publics. Le gouvernement a peur, ce sont les troubles les plus importants depuis Mai 68. Le Ministère de l’Intérieur déclare l’état d’urgence et le couvre-feu. La répression est terrible : plus de 3000 arrestations, une justice d’exception et des peines de prison très lourdes viennent mater la révolte. Le soulèvement est l’occasion de tester de nouveaux moyens de répression, notamment les premiers drones de surveillance, qui sont déployés en région parisienne.

Après ce soulèvement réprimé, les dirigeants décident de ne rien changer. Les mêmes politiques économiques et répressives continueront à marginaliser les quartiers. Les fils et filles d’immigrés subiront les mêmes violences d’État, le même racisme.

Pire encore, en 2007, Sarkozy est élu Président de la République. La police sera dotée d’un tout un nouvel arsenal de répression, notamment le Lanceur de Balles de Défense. Les lois racistes et sécuritaires continueront de se durcir inlassablement jusqu’à aujourd’hui. En 2015, les policiers mis en cause dans la mort des deux adolescents sont relaxés. À Clichy-sous-Bois, le quartier HLM d’où sont parties les émeutes est toujours enclavé, mal desservi par les transports, touché par la misère et manque de service public. Mais l’État y a construit un commissariat tout neuf et hautement protégé en 2010.

Presque 20 ans après les émeutes pour Zyed et Bouna, la militarisation galopante de la police suit son cours. Le racisme d’État s’exerce toujours plus fortement contre les jeunes noirs et arabes, surtout s’ils sont musulmans. Des pans toujours plus larges de la population sont victimes de violences policières. Les lois sécuritaires et liberticides se sont multipliées. La police radicalisée s’autonomise d’avantage. Le ministre de l’intérieur est d’extrême droite, le gouvernement assume au grand jour ses penchants pétainistes et applique la politique du Rassemblement National. Du côté des syndicats de police et des fascistes, le désir de guerre civile et d’envoi de l’armée dans certains quartiers sont affirmés sans pudeur.

Le média Bastamag comptabilise ce chiffre terrible : depuis la mort de Zyed et Bouna, entre 2005 et 2025, 562 personnes sont décédés à la suite d’une intervention de police, sans compter les interventions anti-terroristes. Un tiers de ces décès a eu lieu à la suite d’un contrôle de police ou d’une tentative de contrôle. En 2024, 65 morts ont été recensés, un record.

En juillet 2023, c’était une autre onde de révolte qui embrasait les banlieues françaises après l’exécution par balle du jeune Nahel. En 4 nuits seulement, les autorités recensaient « 2579 incendies volontaires », 1100 bâtiments brûlés ou dégradés dont 269 locaux de forces de l’ordre. Des commissariats, des mairies et des préfectures étaient envahies et mises à sac. 70 départements métropolitains – dont 13 durant 4 nuits d’affilée – et 516 communes étaient touchées. L’extension territoriale de telles émeutes était sans précédent : elles touchaient des villes moyennes et même des communes rurales. La déflagration était aussi puissante qu’éphémère, car le gouvernement déployait l’antiterrorisme dans les rues, mutilait et blessait des centaines de personnes et tuait un livreur, Mohammed Bendriss à Marseille. Plus de 4000 jeunes étaient arrêtés, dont 1056 jetés en prison.

En cet automne 2025, rien n’est pardonné, ni pour Zyed et Bouna, ni pour Nahel, ni pour toutes les victimes des violences policières. En 2023 comme en 2005, l’État a tremblé face à la colère fulgurante des oubliés et des méprisés. Avant de reprendre la main, faute de coordination des insurgés, de renforts venus du reste de la population et d’actions simultanées sur le reste du territoire, notamment près des lieux de pouvoir.

La prochaine étincelle pourrait bien être celle qui embrasera la plaine pour de bon.

- source, avec des liens : https://contre-attaque.net/2025/10/27/il-y-a-20-ans-la-mort-de-zyed-et-bouna-vague-de-revolte-dans-les-banlieues/

2005 : mort de Zyed et Bouna - 2023 : Nahel assassiné par des flics - Rien n’a changé et la situation a empiré

- Voir aussi :

  • [Brochures] Pour Zyed, Bouna, Rémi et les autres : ni oubli ni pardon ! - Il y a quinze ans, en novembre 2005, se déroulait une révolte incendiaire d’une ampleur inédite sur pratiquement tout le territoire français, principalement dans les quartiers populaires, suite au décès le 27 octobre 2005 à Clichy-sous-Bois de deux adolescents qui tentaient de fuir un contrôle de police : Zyed Benna et Bouna Traoré.
    Les assassinats policiers étaient fréquents avant 2005. Ils le sont toujours en 2020. Les tenants de la « real politik » prétendront que cette révolte incendiaire n’a donc servi à rien. Au contraire, cette révolte a montré que l’inacceptable ne doit pas rester sans réponse, que la colère partagée par la population peut s’exprimer de manière spontanée et autonome sans leaders ni manipulateurs, loin des partis politiques et des récupérateurs de toutes sortes. Et si cette révolte, comme beaucoup d’autres, a pu sembler sans perspectives, elle a posé le point de départ nécessaire à toute possibilité d’envisager un changement concret de société, un renversement réel du système : ce point de départ, c’est une défiance assumée, directe, sans dialogue ni médiation, de l’État et de son bras armé toujours plus puissant, la police.
    Parce que pour tous les assassinats policiers, il n’y aura ni oubli ni pardon, parce que les luttes passées peuvent inspirer les luttes présentes et à venir, nous avons publié récemment sur infokiosques.net deux « vieilles » brochures revenant sur la révolte incendiaire d’octobre-décembre 2005 (...)
  • 20 ans de la mort de Zyed et Bouna : « La liberté de circuler est une question environnementale » - 20 ans après la mort des adolescents Zyed Benna et Bouna Traoré, l’autrice Rokhaya Diallo dénonce la « haine » persistante envers les quartiers populaires qui sert de « carburant électoral » à une partie de la classe politique. (...) Le discours raciste s’est installé au cœur du débat public, poussé par l’extrême droite mais repris bien au-delà. On a fait croire que les habitants des quartiers populaires étaient des privilégiés, qu’ils reçoivent des financements conséquents, opposés à une France dite « périphérique » qui ne recevrait pas la même attention.
    On accuse les quartiers populaires de tous les maux. Les attentats ont renforcé cette suspicion : le fait qu’ils aient été commis par des personnes se réclamant de l’islam a jeté un soupçon collectif sur des millions de musulmans.
    Et la classe politique n’a aucun intérêt à en tirer des leçons. Cette haine sert de carburant électoral. Elle est un matériau précieux pour lui permettre de prospérer politiquement. Alors elle l’alimente. Plutôt que d’agir sur les conditions de vie, on désigne des boucs émissaires. C’est cynique, mais efficace politiquement — et c’est ce qui rend la situation si tragique.

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