Face au risque d’auto-destruction de l’espèce humaine, changeons de vitesse et d’objectifs !

C’est de la folie de s’accrocher encore au capitalisme et au système en place ! Résister, réformer ou collaborer est inadapté : la seule issue est de tout changer au plus vite

lundi 30 octobre 2017, par Camille Pierrette.

Les luttes pour le droit du travail, le maintien de l’emploi, la préservation du pouvoir d’achat sont à mon avis des combats inadaptés à la situation présente qu’il faudrait dépasser au plus vite pour passer à autre chose de plus réaliste, de plus enthousiasmant et de plus ambitieux, et aussi pour pouvoir répondre rapidement et de manière adéquate aux énormes problèmes climatiques et écologiques causés par l’humanité. Ce sont maintenant les problèmes n°1 puisqu’ils pourraient entraîner la disparition de l’espèce humaine et de la plupart des êtres vivants vers la fin du siècle.

- Les objectifs des mouvements sociaux actuels sont périmés/dépassés pour deux raisons principales :

1. Le capitalisme et son monde est implacable, c’est un système totalitaire, violent et extrémiste

Comme tout le monde peut hélas le constater, le système capitaliste (l’économie de marché) impose son hégémonie pratiquement partout sur la planète, tout se privatise et devient marchandise.
Il est donc en mesure d’imposer presque partout ses règles et ses exigences dans un monde où chaque pays, chaque entreprise, chaque individu est en concurrence permanente et accrue avec tous les autres.
La libre circulation des biens (les freins douaniers et réglementaires étant faibles), des capitaux (partout et 24/24) et des personnes (quand ça arrange entreprises et Etats) permet à l’économie de marché de tout contrôler et de soumettre partout les structures, activités et gouvernements à son joug.

Les entreprises sont délocalisées là où la main d’oeuvre est la moins chère et où les réglementations et taxes sont les plus avantageuses.
Les disparités mondiales entre Etats pour les niveaux de vie et les ressources monnayables feront qu’il sera toujours possible aux Marchés de trouver un pays à exploiter, à « coloniser », un lieu plus avantageux où délocaliser.
De nos jours, on peut fabriquer à très bas coûts en Asie des produits et les revendre très chers en occident, alors comment voulez-vous que les pays occidentaux puissent rivaliser ?!
Et quand l’Asie sera moins rentable pour les grosses entreprises, elles iront en Afrique ou ailleurs, puis peut-être un jour reviendront en occident quand il sera suffisamment paupérisé et offrira des conditions de travail suffisamment dégradées pour que la Croissance et les profits puissent toujours crever les plafonds.

Quand des classes de travailleurs obtiennent plus de droits, ils rendent au fil du temps les entreprises concernées moins intéressantes pour les actionnaires, qui finissent par délocaliser ou par créer des structures moins contraignantes (ubérisation).
Et donc, dans le cadre capitaliste, lutter pour plus de droits et de meilleurs salaires revient malheureusement à terme à scier la branche sur laquelle on est assis.
Les « avantages » ne sont pas acquis mais ne sont que temporaires.

A l’intérieur d’un pays, pour des produits plus difficilement importables, la concurrence est peut-être moins vive, mais les mécanismes sont les mêmes (privatisation, concentration, accumulation du capital, ouverture à la concurrence).

Au fond, le problème ne vient pas de patrons ou d’actionnaires voyous ou sans scrupules, c’est ce système économique auquel tout le monde s’accroche qui est fondamentalement vicié et destructeur et qui entraînera toujours des pratiques et conséquences néfastes quelles que soient les rustines qu’on veut lui appliquer.

Et je n’ai pas parlé de la tendance néfaste du Marché à atomiser les gens, à les transformer en petite entreprise ou en petit propriétaire avec des intérêts particuliers à défendre, à créer des corporations ayant chacune leurs priorités, à détruire toute forme de conscience collective ou de classe.

- Bref, de nos jours, il est vain d’espérer gagner des points importants dans un tel système.
La nécessité capitaliste de la compétitivité, de la Croissance et du profit fait qu’il faut déréguler toujours plus et payer toujours moins les salariés pour remporter des marchés, avec des emplois toujours moins nombreux.
Au mieux, on peut espérer ralentir un temps le rythme des « réformes » (= mesures ultralibérales), mais en aucun cas revenir au plein emploi de jadis, à la vraie sécurité sociale, etc.
On le constate depuis des années, avec récemment la loi « Travaille ! » du triste gouvernement Hollande et les projets actuels du sinistre Macron.
Un retour massif à un capitalisme plus local paraît improbable, et ne règlerait pas la question du point 2.

En conséquence, si on veut vraiment vivre mieux, dans la solidarité, la coopération, le partage, la fraternité, le respect de tous les humains et du vivant ici et ailleurs, il faut absolument imposer et construire un autre système.
Et puis à quoi cela sert-il de s’échiner au travail pour qu’une poignée d’actionnaires, de possédants et de parasites surconsomment grâce aux plus values extorquées, et planquent des milliards dans des paradis fiscaux ?
Sans toute cette clique, sans le gaspillage, le conservatisme et la destruction inhérents au capitalisme, on aurait beaucoup beaucoup moins à travailler, et avec plus de sécurité et de satisfactions de nos besoins réels (on pourrait même satisfaire des besoins méconnus de paresse, d’instruction ou de participation active et quotidienne à la vie politique).

Au lieu de défendre des petites parts de gâteau vouées de toute façon à disparaître petit à petit, sortons du capitalisme en construisant autre chose, passons à l’offensive !
Cessons d’être sur la défensive et exigeons/proposons, et surtout construisons une économie soutenable, des systèmes d’échanges remis à leur juste place de simples productions pour satisfaire des besoins réels décidés démocratiquement (rappelons que les entreprises capitalistes sont encore moins démocratiques que le système politique oligarchique en place).

On ne peut pas espérer gagner quelque chose de significatif en utilisant le terrain, les armes, le discours, le calendrier et la pensée du système que l’on combat, surtout quand le dit système est ultra puissant. C’est perdu d’avance.
Donc, combattons et construisons sur d’autres terrains, avec d’autres armes et d’autres discours, avec notre calendrier et nos objectifs.

Bien entendu, ça implique aussi de grands changements, et en particulier de construire de vraies démocraties à échelles humains à la place des actuels systèmes étatiques non démocratiques, centralisés et bureaucratiques, qui sont d’ailleurs de fait les alliées et les complices du capitalisme.

En conséquence, pour moi, à l’heure actuelle, dans ce contexte, les manifestations qui se limitent à essayer d’empêcher les choses d’empirer dans le cadre existant du capitalisme « triomphant » et de la non-démocratie généralisée sont une sorte de déclaration publique d’impuissance et de soumission à l’État et à l’économie de marché.
Je trouve ça dégradant et humiliant de manifester dans ce cadre, et j’ai aussi très fortement l’impression de perdre mon temps (d’ailleurs je n’y vais plus), c’est déprimant au possible.

Je force un peu le trait par provoc, mais arrêtons d’être des moutons dociles qui se limitent à réclamer la non-aggravation d’une situation générale déjà très grave et dégradante. Sortons vraiment du cadre, goûtons d’autres herbes que du vieux foin OGM, proposons et construisons autre chose ! Quittons le Titanic en masse !

2. Il y a urgence à tenter d’empêcher l’auto-destruction de notre espèce

Face à l’urgente nécessité d’agir rapidement et radicalement pour tenter de limiter l’ampleur des catastrophes climatiques et écologiques à venir (en diminuant très fortement et très rapidement nos émissions de gaz à effet de serre), et ainsi préserver les chances de survie de l’humanité, on a besoin de toutes nos forces. Il est donc dommageable de passer trop de temps et d’énergie à des combats perdus d’avance du siècle dernier qui se contentent d’aménager le système en place.
Le capitalisme et son monde (et aussi ses dogmes et ses mentalités imprimées partout en nous) étant la cause principale des problèmes climatiques et écologiques, on ne peut pas continuer à tenter laborieusement de le contenir temporairement ou de le réformer (à supposer que ce soit possible).

Reportez-vous à mon autre article Dernière chance pour enrayer l’auto-destruction de l’humanité !? pour plus de développements sur ces sujets.

- D’autres articles sur Ricochets et ailleurs :

- Les deux raisons pour lesquelles les actuels mouvements sociaux sont « périmés » se rejoignent donc et aboutissent toutes les deux aux mêmes exigences :

  • sortir du capitalisme et de sa Croissance folle au plus vite, partout, dans tous les domaines, de multiples manières
  • et donc construire au plus vite dans tous les domaines des échanges hors Marché, dans la « décroissance », la résilience, la sobriété heureuse
  • construire des démocraties réelles à la place des Etats et des oligarchies


- Dans 20 ans, quand ce sera plus visible et débattu au journal de 20h, ce sera trop tard.

Ces exigences appellent au plus vite à mettre en place massivement d’autres types d’objectifs que la tentative de maintenir quelques droits, aussi utiles soient-ils dans CE contexte, un peu plus longtemps.
Mieux vaut utiliser notre énergie à des actions plus utiles et plus accessibles.

Macron tiendra sans doute le même discours en 2017 !

Actions urgentes pour répondre aux exigences de notre temps

Les « nouvelles » exigences des catastrophes climatiques et écologiques dues aux activités humaines de l’économie de marché, comme l’ancienne exigence de justice sociale face à la violence totalitaire de l’extrémisme capitaliste incitent donc à des transformations radicales seules capables d’y répondre.

Les actions à mener en priorité sont à voir selon les régions et la situation, mais on peut donner quelques idées, non hiérarchisées et non exhaustives (voir aussi des grandes lignes dans mon article « Dernière chance pour enrayer... ») :

  • La création de nombreuses et diversifiées coopératives (non productivistes) locales à but non lucratif, situées le plus possible hors marché
  • L’occupation d’usines, de bâtiments, de terres pour créer des coopératives à but non lucratif libérées de la propriété de quelques uns.
  • Le développement et la mise en lien avec ces coopératives des initiatives associatives et des collectifs qui s’organisent dans une optique de décroissance soutenable
  • La création de divers réseau d’échanges et de solidarité hors Marché.
  • La prise du pouvoir politique par les peuples pour créer des démocraties réelles (directes, participatives), d’abord localement
  • Multiplier les logements (et autres biens) en propriété collective à l’abri de la spéculation, se désintoxiquer de la propriété privée
  • S’habituer à échanger sans argent, et même sans monnaie, au sein de divers réseaux de confiance, se désintoxiquer de la monnaie et de l’obsession de donner un prix subjectif à tout
  • Créer dans chaque région des grands médias autonomes participatifs et multi supports pour appuyer tous les autres points, et chercher à obtenir d’une manière ou d’une autre des chaînes de télévision
  • Multiplier, pour les jeunes et les autres, les cercles de formation à une autre société, de l’auto-éducation, notamment pour des domaines utiles aux autres points
  • Diminuer fortement nos consommations de viandes et de produits animaux
  • Plus généralement, diminuer toutes nos consommations, pour vivre la décroissance soutenable, la sobriété heureuse. Du coup on a moins de besoins, moins besoin de travailler et on commence à soulager « la planète »
  • Tout faire pour diminuer nos temps de travail dans le système en place (ce qui permet, pour les riches et classes moyennes, de s’habituer à vivre plus sobrement, et d’avoir plus de temps libre pour agir)
  • Etre solidaire des plus pauvres pour qu’ils puissent eux aussi travailler moins et vivre mieux
  • Intégrer les chômeurs et autres RSA-istes dans la construction de cette nouvelle société
  • Ne plus prendre l’avion (le transport le plus polluant), surtout pour les courtes distances
  • Diminuer fortement l’utilisation de nos voitures et leur nombre (donc mettre en place des alternatives pour que ce soit faisable)
  • Etre en lien et solidaires des autres peuples, en court-circuitant gouvernements et Etats
  • etc.

Le tout pouvant être assorti de toutes sortes d’actions collectives de désobéissance civile.

- Si on se tourne vers le local, pour Crest et sa région, on pourrait par exemple, pour commencer :

  • développer le média Ricochets (fréquence, épaisseur et tirage des version papier, et utiliser d’autres supports) et la radio RSF
  • faire grandir le Réseau Autonomie Crest qui a des objectifs similaires, qui veut encourager diverses activités de services et de productions hors Marché
  • créer un grand lieu collectif autogéré, capable d’accueillir nombre d’initiatives et activités en résonance avec la liste ci-dessus (cantine populaire, formations diverses vers l’autonomie, partage d’informations, ateliers...)
  • Ce lieu, ou un autre, pourrait servir de démonstration, et d’incubateur pour des tas d’autres initiatives collectives
  • créer une première coopérative à but non lucratif
  • commencer à sortir des biens immobiliers de la propriété privée et de la spéculation
  • développer le partage de véhicules hors du cadre marchand
  • créer une caisse de solidarité mutuelle
  • etc.

Bref, les idées et chantiers ne manquent pas. Il serait plus réaliste, efficace et motivant que les minorités les plus révoltées et conscientes s’orientent ensemble dans ces directions au lieu de s’accrocher chacune à leur parti et leur syndicat, et de se contenter d’un énième mouvement de défense des « acquis sociaux ».
En sachant que de petites minorités ne suffiront pas, il faudra aussi très rapidement que de nombreuses autres personnes de toutes les classes sociales rejoignent cette transition radicale, y compris les plus riches.

Au lieu de s’accrocher à ce système, de s’épuiser à le réformer où à le contrer, il est plus que temps de faire radicalement autre chose. La perspective des catastrophes climatiques et écologiques oblige à sortir du capitalisme, de la croissance, de la fausse démocratie.
On pourrait donc faire une pierre deux coups, préserver notre survie oblige à changer toutes les conditions sociales et économiques, à viser mieux et plus loin que ce qui est visé par la plupart des syndicats et mouvements sociaux.
L’utopie folle n’est pas la décroissance soutenable et les changements radicaux.
La folie, extrémiste et irréaliste, serait plutôt de croire que le capitalisme et le système en place sont porteurs d’avenir et de s’y accrocher !

Au lieu de subir encore et d’être sur la défensive sur un terrain boueux où on tourne en rond, passons à l’offensive sur des terrains plus fondamentaux, pour vraiment vivre mieux, pour préserver la vie de nos enfants et petits enfants, et espérer ainsi empêcher la disparition prochaine de notre espèce vers 2100 (ou au minimum de très très grosses catastrophes meurtrières).


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