Quand Biovallée fait la promo de l’IA, le 25 septembre à Eurre

Une « transition technologique » plutôt qu’une salvatrice rupture écologique et sociale ?

lundi 23 septembre 2024, par Antitech 26.

Biovallée® (et Entreprise du futur ?) organise le 25 septembre une conférence payante pro IA intelligence » artificielle).

Présentation de l’événement, puis remarques critiques et moyens de contacter les organisateurs et intervenants.

Présentation de cette conférence :

Extraits des présentations par Biovallée :
« Inutile de l’ignorer, elle (l’IA) est présente partout et va bouleverser de nombreuses activités humaines. Comment cette technologie peut-elle être mise au service de la transition des organisations ? Comment les entreprises, même de petite taille, peuvent-elles s’en saisir pour améliorer leurs performances environnementales, repenser leur modèle économique, voire redonner du sens au travail ? (...) C’est en apprenant comment l’IA fonctionne, quand et comment l’utiliser, que nous pourrons en tirer profit »

(...)
Au programme :

  • Conférence inaugurale par Laurence Devillers, chercheuse au CNRS en IA et éthique
  • Table ronde : témoignages de chefs d’entreprises (PME/ETI) et experts en IA appliquée aux enjeux de transition des organisations
  • Cocktail

La conférence se déroulera le mercredi 25 septembre, de 14H à 17h, dans l’amphithéâtre de l’écosite du Val de Drôme à Eurre (26).
La billetterie est ouverte et vous pouvez d’ores et déjà vous inscrire (NOTE : 80 € ! 50 € pour les adhérents Biovallée. L’IA ça se mérite !)
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Laurence Devillers est professeure titulaire en informatique appliquée aux sciences humaines et sociales à Sorbonne Université et au Centre national de la recherche scientifique (CNRS-LISN, Paris-Saclay). Elle est responsable de la chaire de recherche en intelligence artificielle HUMAAINE : HUman-MAchine affective Interaction & Ethics, et membre du Comité national pilote d’éthique du numérique (2019-2024). Les intérêts de recherche de Laurence Devillers comprennent la détection des émotions dans l’audio, les stratégies de nudge, les agents conversationnels et les robots sociaux. Elle a participé à plusieurs projets nationaux et européens sur les interactions sociales et émotionnelles entre humains et robots.
(...)
Frédéric Créplet, Directeur général d’Energy’s, groupe conçu pour développer des solutions et des services autour de l’eau et de la performance énergétique, associant expertises métiers et technologies numériques.
(...)

- Voir aussi un message de l’association Biovallée® sur Linkedin qui précise :
« AlleluIA - L’intelligence artificielle au service de la transition de votre entreprise, mirage ou miracle ? ».
Pour vous mettre en appétit d’ici là, voici un peu de lecture !
« C’est en apprenant comment l’IA fonctionne, quand et comment l’utiliser, que nous pourrons en tirer profit »

(NOTE : Voilà qui résume bien l’intention de la conférence !)

Quand Biovallée fait la promo de l’IA, le 25 septembre à Eurre
Data centers et mines polluent énormément. Il faut de l’énergie, et les mines trient/extraient beaucoup de roches pour de faibles pourcentages de minerais utiles

Remarques critiques

Ci-dessous une version "augmentée" de la tribune publiée dans le journal le Crestois du 20 septembre : Quand Biovallée fait la promo de l’IA - En contradiction avec ses visées supposément écologistes ?

Derrière le côté interrogatif pour la forme "mirage ou miracle ?" et les prétentions éthiques, on voit vite qu’il s’agit de mettre en valeur les supposés "bons usages" des IA (ni mirage ni miracle), sans s’interroger vraiment sur l’IA elle-même ni le monde qui va avec.

Améliorer des performance environnementales avec une technologie qui contribue grandement à accélérer le réchauffement climatique et à détruire les écosystèmes ?!
Grande idée !
Datacenters, câbles, puces, centrales électriques, écrans, mines, réseaux…, l’IA a un très lourd et nocif impact matériel, comme tout le monde numérique et cybernétique. Les éventuelles futures efficacités énergétiques et sobriétés n’y changeront rien, vu l’explosion des usages prévue, effet rebond oblige.
Reporterre.net indique par exemple : « Google a ainsi révélé avoir prélevé 28 milliards de litres d’eau dans l’année, dont les deux tiers — de l’eau potable — pour refroidir ses data centers. Entre 2018 et 2022, ses prélèvements ont bondi de 82 % » - « l’industrie mondiale des centres de données, de l’IA et des cryptoactifs devrait doubler sa consommation d’électricité d’ici 2026, générant un surplus de 37 milliards de tonnes de CO2 dans l’atmosphère. Ce qui représente l’équivalent de la consommation annuelle d’un pays comme le Japon ». (le patron d’OpenAI s’en remet à la géoingénierie en guise de « compensation »)

- Cet événement Biovallée cumule de manière provocante : technosolutionnisme, acceptation aveugle des innovations techno-capitalistes et de la fuite en avant du « progrès » vers le gouffre, acceptation du capitalisme et de sa logique abstraite dévastatrice, foi illusoire dans l’éthique pour réguler l’IA, occultation des très graves problèmes sociaux/écologiques/climatiques posés par l’IA, foi dans la supposée « neutralité » des technologies (où seuls les usages sont sensés poser problème, mais pas la technologie elle-même), approbation de la dépendance aux technologies complexes et à leurs experts, etc.

Dans la civilisation industrielle, l’éthique n’est qu’un outil de gestion pour faire accepter les « innovations » techno-économiques, elle s’adapte docilement à l’évolution des besoins du système industriel, elle n’est que de la poudre au yeux.
On voit par exemple que des robots tueurs militaires autonomes existent déjà, et toutes les armées les utiliseront dès qu’un ennemi le fera. La concurrence économique ou militaire font sauter (quasiment) toutes les éventuelles digues morales.

On pourrait être choqué par le fait que Biovallée semble ici en totale contradiction avec les valeurs écologiques qu’elle affiche. Qu’en pensent d’ailleurs le collège des acteurs associatifs de Biovallée et les associations adhérentes ?
En fait, la contradiction est la règle, cette apologie de l’IA s’inscrit pleinement dans le « capitalisme vert » porté par Biovallée (et par la plupart des ONG, partis et collectivités locales). Les jolies expressions telles que « transition écologique et sociale du territoire » masquent le fait qu’il n’y a au fond aucune remise en cause du modèle économique et technocratique qui épuise et détruit la Terre (et tous ses habitants). Biovallée c’est un peu tout et son contraire, du bon comme du très mauvais. Dis autrement, en acceptant le capitalisme et son monde (entreprises, travail, argent, valeur, marchandise, concurrence, productivité, compétitivité, innovations technologiques, absence de démocratie réelle...), Biovallée se rend structurellement incapable d’atteindre ses objectifs écologiques malgré les bonnes volontés de certain.es. Renommer l’irréformable, destructrice et gloutonne économie de marché en « économie circulaire », « écologie industrielle » (sic) ou « transition » n’y change rien. Ca revient juste à vouloir inventer l’impossible machine à mouvement perpétuel (mais « propre » et « décarbonnée » bien sûr...).
Si ce modèle de société a vitalement besoin de l’IA pour alimenter sa désastreuse « croissance infinie », nous n’avons pas besoin de l’IA pour vivre, ni du capitalisme, de sa croissance, de son système de travail, de ses entreprises/marchandises.

En pratique, Biovallée est surtout une machine à fabriquer du rêve et de l’espoir, à faire perdurer un modèle fondamentalement écocidaire et antisocial en tentant de le verdir et de le réformer à la marge, à capter des subventions et à les distribuer à des ingénieurs/entrepreneurs. Et il ne peut pas en être autrement, l’État et l’Europe ne financeraient pas un projet de rupture avec le modèle de société en place.

Cet événement de promo de l’IA montre ce qu’est Biovallée, et au-delà démasque tous les discours de « transition » qui ne remettent jamais vraiment en cause le modèle de société qui nous précipite vers les abîmes. La vallée de la Drôme n’est pas à l’abri de cette réalité, pas plus que les restes du monde.

- Pour aller plus loin, retrouvez sur Ricochets.cc et dans les meilleurs infokiosques, ma « Synthèse de critiques de l’IA et de son monde Machine ».

- Le 17 septembre, Biovallée a aussi publié un podcats avec Laurence Devillers
Quelques remarques complémentaires :
Pour Laurence Devillers, l’IA est un miracle et un mirage, elle peut apporter beaucoup mais ne peut pas tout.
Elle dit qu’il y a des choix à faire, tandis que Pierre Georgin (Responsable de projet Ecologie industrielle et territoriale à Biovallée) parle de responsabilité des entreprises
Laurence parle d’une supposée IA frugale, mais ne parle pas de l’inflation des usages et des appareils qui annulent l’éventuelle frugalité.
Bref, le podcast confirme l’intention hors sol de moraliser les IA et de les verdir. Les intervenants ne veulent pas se rendre compte que le capitalisme annule(ra) tous leurs gentils efforts de rendre sympa une technologie beaucoup plus néfaste qu’utile.

Ils mettent en avant certains usages, dans la médecine ou l’agriculture, pour faire passer la pillule IA. Mais il serait plus efficace de réduire le nombre de cancers en sortant de la civilisation industrielle plutôt que d’améliorer leur détection via IA, et la paysannerie n’a jamais eu besoin des IA pour produire de quoi nous nourrir sans nous empoisonner et sans détruire les sols et le climat.

Cette conférence de Biovallée s’inscrit dans le pullulement actuel d’organismes (les GAFAM en tête) qui veulent nous faire accepter l’IA, nous vendre qu’elle peut être bénéfique, verte, démocratique, sobre, écologique et tutti quanti. Un conte de Walt Disney est plus réaliste que ces fadaises qui font accepter et perdurer la mégamachine écocidaire, autoritaire et anti-sociale qui ravage le monde.
A chaque nouvelle technologie moderne c’est la même rengaine : c’est utile, faut faire gaffe à bien l’utiliser, nos éthiciens veillent, n’ayez pas peur on va vous expliquer comment c’est bien, ça va aider à améliorer les choses.
Résultat : partout tout empire car le modèle de société reste inchangé.

Des technologies, qui de plus contribuent aux désastres, ne sont pas des remèdes. Le remède est dans les radicales ruptures politiques et sociales, pas dans des gadgets pour gérer et faire durer un mauvais modèle.

Quand Biovallée fait la promo de l’IA, le 25 septembre à Eurre
Les déchets électroniques s’accumulent, pour la plupart non recyclables, et le recyclage consomme matières et énergies...

Plus d’infos sur les participants/organisateurs

- Entreprise du futur (à confirmer qu’il s’agit bien de cet organisme ?) - Un club de PME et ETI qui organise des salons. On y retrouve notamment l’affreux ancien boss du Medef Pierre Gattaz, toujours là pour les réformes économiques anti-sociales.

- La conférencière Laurence Devillers est aussi présidente de la fondation Blaise Pascal - Voir ses partenaires (Alstom, Casio, Nexity, L’Oréal, Michelin, EDF, Safran, Havas...)
Il s’agit par exemple dans cette fondation de « démystifier robotique et intelligence artificielle » : On s’initie aux sciences du numérique pour permettre à nos enfants de comprendre et maîtriser leur monde où se développe l’informatique, la robotique et l’intelligence artificielle.
Un partage de la science et des maths (auprès des filles notamment), d’une culture numérique, ...orienté business et acceptation totale du monde techno-scientifique partenaire du techno-capitalisme et de ses outils numériques.

- Un article de la conférencière est conseillé par Biovallée : IA ET SOCIÉTÉ : APPRENDRE À MANIPULER UN NOUVEL OUTIL
extrait de la conclusion :
Cependant l’IA est aussi un réel potentiel pour changer la science, la médecine, l’écologie, etc. L’IA promet de bouleverser l’économie de la connaissance et d’accélérer les processus de recherche et d’innovation. Le lien entre vitesse d’innovation technologique, temps pour la réflexion sociétale et intérêts économiques est au cœur du problème éthique. Il est donc essentiel de bien connaître les atouts et les risques des IA pour en tirer profit. Il est aussi nécessaire, comme avec la bioéthique, de se doter de garde-fous et d’exiger des concepteurs de ces technologies plus de transparence et d’évaluation
Macron, Barnier et les GAFAM ne peuvent qu’approuver ces vertueuses déclarations d’amour envers le progrès et le techno-capitalisme le plus moderne, avec les sable-mouvants ajustables de l’éthique comme cache sexe. Comme si une société non-démocratique encastrée dans le capitalisme, par nature irrationnel, immoral et illimité, pouvait faire véritablement de l’éthique et encadrer/limiter les IA !
Les quelques actions un peu vertueuses sont des niches non généralisables, elles sont annulées par la marche en avant globale et désastreuses de la mégamachine.

Pour s’exprimer auprès de Biovallée and co

Si vous n’avez pas les moyens d’assister à la conférence pour la contester sur place, possible aussi d’écrire aux parties prenantes :

- Certains on déjà commencé à s’exprimer sur la page FB de Biovallée, notamment ce commentaire :
Toute l’industrie numérique, participe à la crise écologique et climatique. De l’extraction des minerais et terres rares à la consommation énergétique des serveurs en passant par la consommation et pollution des ressources en eau ou l’accumulation des e-déchets... absolument toute la chaîne industrielle nécessaire à l’IA est anti-écologique et accélère l’écocide en cours.
Biovallée, encore une fois, participe à la grande arnaque du green-washing, à la « transition technologique » qui n’a rien d’une transition écologique.

P.-S.

Juste un exemple parmi d’autres

Dans la réalité du business, loin des rêveries éthiques, on est encore loin des IA sobres et frugales... :

- Les géants du numérique se convertissent au nucléaire pour étancher les besoins énergétiques toujours plus importants de l’IA - Devant les besoins électriques exponentiels de leurs logiciels, Microsoft, Amazon et Oracle veulent relier des centres de données à des réacteurs.
Quel type d’entreprise peut être à l’initiative de la réouverture d’une centrale nucléaire ? Un géant du numérique et de l’intelligence artificielle (IA). Microsoft a ainsi annoncé, vendredi 20 septembre, la relance de l’unité 1 de la centrale de Three Mile Island, en Pennsylvanie, fermée depuis 2019. Le symbole est fort car c’est dans ce site, sur une unité voisine, qu’avait eu lieu en 1979 un accident nucléaire ayant mis un coup d’arrêt au développement de cette technologie aux Etats-Unis. Plus largement, le projet incarne l’offensive menée par les patrons des grandes entreprises de la tech en faveur du nucléaire, dont ils se font les champions, pour étancher les besoins énergétiques toujours plus grands de leurs logiciels d’IA.
(...)
« Laissez-moi vous dire quelque chose qui va vous paraître vraiment bizarre. (…) Nous sommes en train de concevoir un centre de données qui aura plus d’un gigawatt de puissance électrique (…), et il y a les autorisations pour y construire trois réacteurs nucléaires. Ce sont des petits réacteurs nucléaires modulaires qui vont alimenter le site. Voilà à quel point les choses deviennent folles », a expliqué le fondateur d’Oracle, Larry Ellison
(...)
le spécialiste de la fourniture aux entreprises de services et d’hébergement en ligne dans le cloud a évoqué le coût « astronomique » de l’entraînement des futurs modèles d’IA, toujours plus gourmands en calcul informatique. Pour rester dans la « course », il faudra bientôt investir « 100 milliards de dollars » pour un modèle
(...)
Début mars, Amazon avait déjà frappé les esprits en annonçant le rachat du campus de data centers attenant à la centrale nucléaire de Susquehanna, en Pennsylvanie, la sixième plus grande des Etats-Unis. Pour alimenter en direct ces centres de données, le leader mondial du cloud achète, pour 650 millions de dollars, jusqu’à 900 MW d’électricité sur les 2,5 gigawatts de puissance électrique de la centrale
(...)
M. Altman, pour justifier son investissement dans une technologie du nucléaire encore plus lointaine : la fusion. Le dirigeant d’OpenAI finance ainsi une des start-up espérant un jour la maîtriser, Helion Energy
(...)

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